OFFRES EXCLUSIVES POUR LES MEMBRES DU CLUB VETOQUINOL | REJOIGNEZ LE CLUB MAINTENANT !

Gestion des veaux : comment élever des animaux costauds et en santé

Donner naissance à un enfant est toute une épreuve, même sous les soins d’un médecin et d’infirmières dans l’environnement stérile d’une chambre d’hôpital. À l’inverse, les veaux naissent dans des conditions beaucoup plus difficiles, avec des risques accrus de complications et de maladies ayant souvent des conséquences à long terme. La Dre Kristen Edwards, vétérinaire spécialisée en bovins chez Tavistock Veterinarians en Ontario, explique comment l’application de meilleurs protocoles de santé pour les veaux peut améliorer le bien-être des animaux – et la rentabilité de leur élevage.

Problèmes de santé précoces chez les veaux

Les maladies respiratoires et la diarrhée sont responsables de près de trois quarts (73 %) des décès chez les veaux avant le sevrage. « Les veaux ont généralement un système immunitaire sous-développé pendant leurs premières semaines de vie et sont confrontés à divers agents pathogènes présents dans leur environnement », explique la Dre Edwards. Par exemple, un veau peut souffrir de diarrhée après avoir ingéré des matières contaminées ou développer une pneumonie en raison de la mauvaise qualité de l’air.

Les animaux qui survivent jusqu’au sevrage malgré des problèmes de santé précoces restent désavantagés toute leur vie. Les maladies respiratoires avant le sevrage entraînent chez les veaux « un risque accru d’abattage et de réduction de la production lors de la première lactation », explique Dre Edwards.

Une étude prospective publiée dans le Journal of Dairy Science associe la diarrhée à une réduction de 50 g/j du gain moyen quotidien (GMQ) et à une diminution de 325 kg en production au cours de la première lactation. Une étude ultérieure démontre une corrélation entre le nombre de jours de diarrhée, le taux de survie des veaux et leur prise de poids, les animaux ayant subi moins de jours de diarrhée affichant de meilleurs résultats en général.

Pourquoi la gestion du colostrum est essentielle

Pour faire face à ces menaces précoces, les veaux dépendent du transfert de l’immunité passive à travers le colostrum de leur mère, une substance naturellement riche en nutriments et en anticorps. « Nourrir les veaux avec du colostrum propre et de haute qualité dans l’heure suivant la naissance est l’une des actions les plus importantes pour la santé des veaux », déclare Dre Edwards.

Tous les colostrums ne se valent pas, c’est pourquoi ils doivent être évalués et traités selon les cinq Q de la gestion du colostrum :

  1. Qualité : La teneur en IgG (anticorps), mesurée à l’aide d’un réfractomètre Brix, doit être d’au moins 25 %.  
  2. Quantité : Environ 10 % du poids corporel, soit 3 litres pour un veau Jersiaise et 4 pour un veau Holstein.
  3. Rapidité (« Quickness » en anglais) : Le veau doit être nourri au colostrum idéalement dans la première heure après sa naissance (mais impérativement dans les 6 premières heures), puis à nouveau après environ 12 heures.
  4. Propreté (« Quite Clean » en anglais) : La charge microbiologique totale doit être inférieure à 100 000 ufc/ml pour éviter que la contamination diminue l’absorption des IgG .
  5. Quantification : Mesurer les protéines sériques totales ou les IgG sériques à partir d’un échantillon de sang, idéalement dans les 72 premières heures de vie, permet d’évaluer le transfert de l’immunité passive.

De nombreux facteurs peuvent compromettre la capacité d’un veau à absorber le colostrum, notamment une naissance issue d’une mère soumise à un stress thermique, selon une étude de l’Université de Floride. Néanmoins, l’administration du colostrum en temps voulu reste primordiale pour prévenir les maladies. « Les veaux subissent une fermeture de la barrière intestinale et, avec le temps, leur capacité à absorber les immunoglobulines du colostrum diminue », met en garde Dre Edwards.

De petits changements aux grandes retombées pour la santé des bovins

En médecine, le développement d’une maladie est souvent décrit par la triade épidémiologique, c’est-à-dire l’interaction entre un agent, un hôte et l’environnement. « Les stratégies de prévention et de contrôle efficaces reposent sur l’amélioration de ces trois éléments interconnectés », explique Dre Edwards.

Le maintien de la propreté réduit la prévalence des bactéries et autres pathogènes. De même, les environnements combinant une litière à faible poussière, une densité de troupeau moindre et une excellente ventilation sont moins vulnérables à la propagation des maladies transmises par l’air. La gestion du colostrum, l’alimentation et la sélection de caractéristiques désirables par insémination artificielle amélioreront quant à elles l’immunité et la résilience des veaux.

Des précautions supplémentaires peuvent être prises afin d’améliorer le suivi de la santé des veaux et détecter certaines maladies plus tôt. Un luminomètre ATP est un outil efficace pour évaluer la salubrité de l’environnement en détectant la présence de bactéries, de levures et de moisissures. Dre Edwards utilise fréquemment l’échographie thoracique lors de sa pratique pour déceler les lésions pulmonaires et les pneumonies subcliniques. Elle note que « les lésions pulmonaires de 3 cm² ou plus chez les veaux avant l’âge de 56 jours sont associées à une diminution de 525 kg de lait durant la première lactation »

L’application de ces mesures est bénéfique tout au long de la vie de l’animal. « En veillant à la santé des veaux, nous améliorons aussi leur croissance, leur bien-être, leur production laitière et la rentabilité globale des activités de la ferme », explique Dre Edwards. Tout d’abord, élever des animaux en meilleure santé réduit le recours à l’abattage sélectif et aux coûteux remplacements. Une vaste méta-analyse rapporte également que chaque augmentation de 100 grammes du GMQ avant le sevrage correspond à une augmentation de la première lactation de 155 kg.

Adopter l’esprit entrepreneurial

« Les éleveurs doivent considérer les veaux comme un centre de profit plutôt que comme un poste de dépenses, explique le Dr Edwards. « Par exemple, au lieu de s’attarder aux coûts de la nourriture par jour, il faut considérer le rendement accru de l’investissement qui découle de chaque kilogramme gagné en poids. »

Un principe de gestion bien connu, attribué à Peter Drucker, stipule que « on n’améliore que ce que l’on mesure ». Pourtant, une enquête réalisée en 2023 conclut que la santé des veaux est peu ou mal documentée dans de nombreuses exploitations laitières de l’Ontario.

« Dans le cadre de nos stratégies préventives, obtenir des données plus précises nous aidera à mettre en œuvre des changements de protocole et à réduire l’incidence des maladies en général », déclare Dre Edwards. Elle recommande de documenter méticuleusement tous les aspects en lien avec la naissance, la quantité de colostrum et les heures d’alimentation, les valeurs Brix, les protéines sériques totales, les maladies, tous les traitements et les thérapies administrés, ainsi que les gains de poids à la naissance, à 30 jours et au sevrage. Ces éléments constituent la base du programme de santé des veaux qu’elle dirige chez Tavistock Veterinarians.

L’amélioration de la santé des veaux grâce à de meilleurs protocoles, à la gestion du colostrum et à la salubrité de l’environnement a des retombées considérables sur la croissance, la résistance et la production laitière. En considérant les veaux comme un centre de profit et en documentant soigneusement les données de santé, les éleveurs peuvent améliorer le bien-être des animaux et la rentabilité de leur entreprise, assurant ainsi le succès et la durabilité de l’élevage laitier.

Clubvetoquinol.ca © Tous droits réservés | Plan du site | Politique de confidentialité | Cookies